Mon projet est-il éligible au Crédit d’Impôt Innovation (CII) ?

Votre projet est-il éligible au Crédit d’Impôt Innovation ? Identifiez les critères officiels du CII et vérifiez si votre prototype répond aux exigences de l’administration.

Olivier Equey

Manager en fiscalité de la recherche – France

18/11/2025

12 minutes de lecture


Les dirigeants et directeurs financiers qui nous sollicitent ne comprennent pas toujours comment évaluer l’éligibilité de leurs projets au Crédit d’Impôt Innovation (CII)

Vous devez savoir que le CII ne fonctionne pas comme une simple subvention “pour l’innovation”, mais comme un dispositif dont les critères sont précis, restrictifs et systématiquement vérifiés lors des contrôles. 

Avant de mobiliser des ressources internes, de solliciter la R&D ou de commencer à compiler des dépenses, il est indispensable de savoir si votre projet entre réellement dans le périmètre prévu par la loi.

Qu’est-ce qu’un projet éligible au CII selon l’administration ?

Le CII a ses propres règles à connaître. L’administration considère qu’un projet est éligible au CII uniquement lorsqu’il conduit à la création d’un prototype ou d’une installation pilote d’un produit nouveau, présentant des performances sensiblement supérieures aux solutions existantes. 

Comme le mentionne le site du gouvernement sur le Crédit Impôt Innovation, votre projet relève du Crédit Impôt Innovation (CII) :

« Si celui-ci permet de concevoir ou réaliser un prototype ou une installation pilote d’un produit nouveau au sens de la définition fiscale, votre projet est probablement éligible au CII.

La définition fiscale exige notamment que le prototype ou l’installation pilote présente des performances supérieures sur le plan technique, des fonctionnalités, de l’ergonomie ou de l’écoconception par rapport aux produits commercialisés par vos concurrents à la date de début des travaux.»

Cette définition est strictement encadrée par le code général des impôts, ce qui signifie que l’entreprise ne peut pas se contenter de déclarer qu’elle innove ; elle doit le démontrer de manière structurée.

La notion de “produit nouveau” ne renvoie pas au fait de commercialiser un nouvel article dans la gamme, mais au développement d’un produit présentant une avance fonctionnelle tangible.

Bon à savoir

Le CII ne concerne que les produits matériels ou les produits intégrant une forte composante matérielle. Les prestations immatérielles, comme les services, ne relèvent pas du dispositif, sauf s’ils sont directement intégrés dans un produit physique innovant.

Votre produit apporte-t-il une nouveauté fonctionnelle mesurable ?

Pour qu’un projet soit considéré comme innovant au sens du CII, il doit apporter une amélioration objective et démontrable par rapport aux produits déjà disponibles sur le marché. 

Cette nouveauté ne peut pas reposer sur une appréciation subjective ou sur une simple évolution esthétique. Elle doit s’appuyer sur des critères techniques, d’usage ou de performance qui peuvent être mesurés ou expliqués de manière précise.

Les entreprises peuvent démontrer cette nouveauté en comparant leur projet aux produits concurrents sur des éléments tels que la performance, l’ergonomie, la fiabilité, la précision, l’efficacité énergétique ou l’intégration de matériaux ou composants nouveaux. 

La nouveauté doit apparaître clairement dans cette comparaison et répondre à une limite concrète identifiée dans les offres existantes.

Exemple :

L’Entreprise A, spécialisée dans la robotique agricole, a conçu un système de navigation amélioré permettant de réduire l’écart de trajectoire de 30 % lors de l’utilisation en milieu ouvert. Cette amélioration, mesurée à partir de tests comparatifs, constituait un argument solide pour établir l’innovation fonctionnelle du prototype, car elle répondait à une contrainte technique réelle rencontrée sur le marché.

Lorsqu’elle est bien documentée, la nouveauté fonctionnelle devient l’un des piliers les plus solides de l’éligibilité.

Votre projet conduit-il à la création d’un prototype ou d’une installation pilote ?

Le CII repose sur la notion de prototype. Ce prototype doit être une version non commercialisée du produit, utilisée pour valider les nouvelles fonctionnalités avant toute industrialisation. 

Il doit permettre d’effectuer des tests, d’ajuster la conception, d’analyser la réponse des utilisateurs et de vérifier que la nouveauté fonctionnelle envisagée est réalisable techniquement.

Un prototype conforme au CII n’est pas une simple version esthétique ou un mock-up visuel. Il s’agit d’un assemblage matériel fonctionnel, même partiel, permettant d'évaluer des performances réelles. 

Lorsqu’il est impossible de réaliser un prototype complet, l’entreprise peut développer une installation pilote si celle-ci permet de tester un procédé innovant dans des conditions représentatives.

Au-delà de l’existence d’un prototype, l’administration fiscale vérifie que les opérations de test et de validation ont bien été réalisées. Le BOFiP précise que les travaux éligibles comprennent « la réalisation d’essais, de tests ou de mesures nécessaires pour vérifier que le prototype atteint les performances attendues ».

L’entreprise doit également être en mesure d’apporter des éléments matériels démontrant la réalité de ces opérations. Ces documents peuvent inclure, selon les projets : 

  • des rapports d’essais, 
  • des relevés de mesures, 
  • des analyses techniques, 
  • des observations en conditions réelles, qui permettent de démontrer que le prototype n’est pas un concept théorique, mais bien l’aboutissement d’un processus d’expérimentation structuré.

Bon à savoir

L’absence de prototype constitue l’une des principales causes de rejet des dossiers CII, car elle empêche l’administration d’évaluer la réalité de l’innovation.

Les travaux réalisés sont-ils indispensables à la conception du prototype ?

Dans le cadre du CII, l’éligibilité du projet repose également sur la nature des travaux nécessaires à la conception du prototype. L’administration ne reconnaît comme innovants que les projets qui exigent un ensemble d’activités techniques indispensables et cohérentes. 

Ces travaux doivent contribuer directement à la création, à la validation ou à l’amélioration du prototype. Ainsi, le BOFIP indique : 

« Parmi ces activités figurent : les travaux de conception et de réalisation du prototype ou installation pilote du nouveau produit, y compris les activités de design lorsqu’elles sont indispensables à la réalisation des opérations de conception précitées.

Les essais et l’évaluation comprennent la mise à l’épreuve des prototypes ou installations pilotes de nouveaux produits. »

Il peut s’agir d’analyses, d’essais, de simulations, de modélisations (mécaniques, électroniques ou thermiques), de tests d’usage, de choix de matériaux ou de vérifications fonctionnelles. 

Le projet doit comporter plusieurs étapes successives permettant d’améliorer progressivement le prototype et de lever des incertitudes techniques.

Exemple :

L’Entreprise B a développé un siège pour le transport routier intégrant un mécanisme d’absorption des vibrations. Pour valider ce système, ses équipes ont réalisé des simulations mécaniques, des tests de résistance et plusieurs itérations de conception. Ces travaux ont permis de montrer que la mise au point du prototype exigeait des analyses techniques indispensables, ce qui a conforté l’éligibilité du projet au CII.

Cette nécessité d’un travail approfondi distingue les véritables projets d’innovation des adaptations marginales.

Votre démarche d’innovation est-elle suffisamment structurée pour être défendable ?

Même si le CII n’impose pas une démonstration scientifique comparable à celle exigée dans le cadre du Crédit d’Impôt Recherche, l’administration fiscale attend de votre entreprise qu’elle présente une démarche d’innovation organisée, rigoureuse et suffisamment documentée pour permettre une compréhension complète de la logique du projet.

Un projet dont les étapes n’ont pas été formalisées, tracées ou justifiées peut être considéré comme insuffisamment structuré, même lorsque l’innovation est réelle. 

Cette absence de structuration constitue d’ailleurs l’un des motifs de contestation les plus fréquents, non pas parce que le projet manque de substance, mais parce que l’administration ne dispose pas d’éléments suffisamment clairs pour en apprécier la portée.

Pourquoi un cadrage initial est-il indispensable pour votre projet ?

Une démarche structurée commence généralement par l’élaboration d’un cahier des charges initial, dans lequel l’entreprise décrit les objectifs fonctionnels et techniques du produit. 

Ce document n’a pas besoin d’être exhaustif, mais il doit préciser : 

  • les performances recherchées, 
  • les contraintes à respecter,
  • la problématique que le prototype doit résoudre. 

En l’absence de ce cadrage initial, il devient difficile pour un examinateur extérieur de comprendre la logique du projet ou la nature exacte des innovations envisagées.

Cette structuration repose également sur une analyse des solutions existantes, indispensable pour montrer que l’entreprise a identifié une limite concrète du marché. 

Elle doit démontrer que les produits comparables présentent des insuffisances techniques ou fonctionnelles qui justifient la conception d’un prototype innovant. 

Cette étape est déterminante, car elle permet d’expliquer en quoi les travaux entrepris répondent à un besoin objectivable plutôt qu’à une intuition non validée.

Pourquoi justifier de la nécessité du prototype ?

La justification de la nécessité du prototype constitue une autre composante essentielle de votre démarche. 

L’entreprise doit expliquer pourquoi il était impossible d’intégrer directement les innovations envisagées dans un produit final sans passer par une phase intermédiaire de test. 

Cette justification peut s’appuyer sur : 

  • des incertitudes techniques,
  • des choix de matériaux encore non validés, 
  • des contraintes de performance à vérifier, 
  • des problématiques d’usage nécessitant une analyse en situation réelle. 

En démontrant l’utilité du prototype, l’entreprise montre que les travaux entrepris étaient indispensables, ce qui est essentiel pour la conformité CII. L’administration s’intéresse à la manière dont le prototype a évolué, aux raisons ayant conduit à certaines modifications, et à la manière dont les résultats obtenus ont orienté les décisions techniques.

Bon à savoir

La conservation des maquettes, schémas, croquis, plans, captures d’écran, rapports d’essais, relevés de mesures ou comptes rendus de tests constitue une preuve concrète du chemin parcouru et de la réalité des travaux d’innovation.

Votre produit répond-il à un besoin du marché ou à une opportunité identifiable ?

Le CII ne récompense pas l’innovation pour l’innovation. Il s’applique à des projets qui visent la mise sur le marché d’un produit répondant à un besoin concret, exprimé ou latent, dans un secteur donné.

L’administration cherche à s’assurer que l’entreprise ne développe pas un prototype uniquement pour des raisons internes, mais qu’elle travaille sur un produit dont la valeur économique repose sur une compréhension précise des attentes, des contraintes ou des insuffisances de l’offre actuelle. 

Cette dimension commerciale, souvent sous-estimée par les équipes techniques, constitue pourtant un élément déterminant dans l’analyse d’éligibilité.

Comment sécuriser votre évaluation ?

Pour sécuriser votre évaluation :

  • Il est essentiel de démontrer que la conception du prototype part d’un constat objectivable concernant votre marché. Cette démonstration repose sur la capacité de l’entreprise à expliquer de manière structurée pourquoi le produit envisagé présente un intérêt économique réel. 
  • L’entreprise doit d’abord identifier les limites des produits existants. Il peut s’agir d’un manque de performance, d’une ergonomie insuffisante, d’une consommation trop élevée, d’un encombrement problématique, d’un usage complexe ou d’une fiabilité perfectible. 
  • Il est également nécessaire de décrire précisément les usages que votre produit améliore et la manière dont il répond à un besoin non ou mal couvert. L’innovation peut viser à simplifier un geste utilisateur, à réduire un temps d’opération, à améliorer la précision d’un processus ou à augmenter le niveau de sécurité. 
  • L’entreprise doit en outre expliciter les avantages compétitifs que l’innovation permet d’obtenir. Il peut s’agir d’un gain de performance, d’une diminution du coût de fonctionnement pour le client, d’une durabilité accrue, d’une meilleure adaptabilité à un environnement contraint, ou encore d’une capacité à offrir une fonctionnalité entièrement nouvelle. 
  • Enfin, l’analyse doit montrer que les performances visées créent une valeur mesurable pour les clients ou pour un segment spécifique du marché. Cette valeur peut être liée à une réduction de coûts, à un accroissement de productivité, à une amélioration du confort d’usage ou à une réponse plus efficace à une réglementation sectorielle. 

Erreurs courantes 

L’analyse d’éligibilité doit également permettre de vérifier que le projet ne relève pas d’une catégorie explicitement exclue du CII. 

Un projet ne peut pas être retenu s’il se limite à optimiser un processus interne, adapter un produit existant à un nouveau client, mettre un produit à jour, améliorer son apparence ou assurer une mise aux normes

Ces activités n’exigent généralement pas la création d’un prototype et ne présentent pas une innovation fonctionnelle identifiable.

Pour sécuriser l’analyse, il est utile de distinguer clairement ce qui relève de l’innovation et ce qui ressort d’une logique de modernisation :

  • Un projet innovant introduit une amélioration fonctionnelle mesurable qui modifie la manière dont le produit répond à un usage ou à une contrainte identifiée.
  • À l’inverse, un projet de modernisation vise simplement à remettre un produit existant au niveau des standards actuels ou à répondre à une évolution réglementaire. Cette distinction est essentielle, car un produit modernisé peut être plus performant, mais n’entre pas pour autant dans la catégorie de l’innovation au sens du CII s’il ne comporte pas d’amélioration fonctionnelle véritablement nouvelle.

Points importants à retenir

  • Seules les innovations aboutissant à un prototype ou une installation pilote sont éligibles.
  • Le produit doit présenter une nouveauté fonctionnelle claire, mesurable et démontrable.
  • Les travaux doivent être indispensables à la conception du prototype et structurés en plusieurs étapes.
  • L’entreprise doit être en mesure de justifier les limites du marché actuel et l’intérêt économique du produit. En effet, l’entreprise ne développe pas un prototype innovant uniquement pour des raisons internes. 
  • Les adaptations, mises à jour ou améliorations internes ne relèvent pas du CII et doivent être exclues dès le départ.
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