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C’est dans le 3e arrondissement que des chercheurs de Meta et d'OpenAI construisent la prochaine génération d'intelligence artificielle. Paris, la nouvelle place de la tech, vraiment ?
Ces spécialistes de l'apprentissage automatique se sont fait les dents dans les bureaux des plus puissantes entreprises Big Tech de la Silicon Valley, et ils ont maintenant pris leur envol pour travailler sur leurs propres start-ups. Ils sont unanimes : la France est l'endroit idéal pour fonder une entreprise d'IA aujourd'hui.
Et l’Europe aime beaucoup ces expatriés.
Cela intervient alors que les pays européens tentent de plus en plus de développer des technologies stratégiques sur leur territoire et de réduire leur dépendance à l'égard de la technologie américaine.
"J'ai eu deux start-ups dans le domaine de l'IA auparavant, et j'ai déménagé aux États-Unis pour cela. Si vous n'étiez pas à San Francisco, vous n'étiez pas quelqu'un", explique Alex Lebrun, cofondateur de la société Nabla, spécialisée dans la technologie de la santé par l'IA, et ancien ingénieur de la division IA de Meta. "Aujourd'hui, la situation a vraiment changé, et Paris est un haut lieu de l'innovation”.
Nabla - qui utilise de grands modèles de langage (LLM) pour aider les cliniciens et réduire leur charge administrative - partage ses bureaux avec Dust, une startup d'IA cofondée par l'ancien ingénieur de recherche d'OpenAI, Stanislas Polu. Non loin de là, la startup d'IA générative Mistral, fondée par d'anciens membres du personnel des laboratoires d'IA de Meta et de Google, réfléchit à la manière de dépenser son capital d'amorçage de 105 millions d'euros.
En fait, Paris a beaucoup d'attrait ces jours-ci parce que le pays dispose d'un très grand réservoir de talents dans la recherche sur l'IA, avec ces grandes écoles et ses ingénieurs.
Mais cela inclut aussi les laboratoires de recherche de Facebook et de Google dans la capitale, et "beaucoup de très bons ingénieurs et scientifiques", selon M. Lebrun, qui ajoute qu'il est économiquement logique de construire l'entreprise dans cette ville : "80 % de nos utilisateurs se trouvent aux États-Unis, mais nous sommes basés à Paris parce que les ingénieurs en IA sont bons et bon marché par rapport aux États-Unis”
Ce dispositif, financé par le ministère de l'enseignement supérieur de la recherche et de l'innovation, encourage les entreprises à embaucher des doctorants en contribuant au paiement de leur salaire.
💡Bon à savoir
On vous en parle d’ailleurs dans notre article Recruter un jeune chercheur : avantages et dispositifs d'aide ou encore Jeune docteur : un statut gratuit pour votre entreprise dans votre démarche CIR ?
Et les jeunes docteurs sont en fait “gratuits” pendant deux ans, ce qui est parfait pour des entreprises qui en embauchent à la pelle.
Pourtant, le fait que Paris accueille désormais trois startups de premier plan fondées par d'anciens élèves de Meta, OpenAI et Google ne représente que la partie émergée de l'iceberg
"DeepMind et Meta, comme je le vois de l'extérieur, semblent avoir plus de mal à retenir les talents ces jours-ci", affirme Stanislas Polu, l’ancien de OpenAI. "Aux États-Unis, OpenAI absorbe tous les talents comme un trou noir, mais ils n'ont pas encore compris comment faire en Europe. On se retrouve donc avec un vivier de talents disponibles à Paris et à Londres - mais à Paris en particulier - qui sont prêts à explorer et à faire des choses."
L'optimisme parisien de Stanisla Polu doit être pris avec des pincettes. Une étude récente de Sequoia a révélé que Londres possède plus de trois fois la part des talents européens en IA que Paris (12,29 % contre 3,81 %), et OpenAI a récemment choisi la capitale britannique comme lieu d'implantation de son premier bureau en dehors des États-Unis.
Mais Mistral, Nabla et Dust ont maintenant levé des fonds auprès de quelques-unes des plus grandes sociétés de capital-risque au monde, comme Sequoia et Lightspeed, ainsi que de business angels de premier plan comme Xavier Niel et l'ancien PDG de Google, Eric Schmidt - ce qui montre l'impact de la présence d'un grand nom de la technologie sur le CV des fondateurs.
Bien que ces startups partagent une ville d'origine et l'expérience des meilleurs laboratoires d'IA du monde, elles adoptent des approches très différentes pour créer des entreprises avec l'IA générative. On vous explique.
À l'une des extrémités du spectre se trouve Mistral, qui a levé son megaround quatre semaines après son lancement, quelques jours après avoir embauché du personnel et sans avoir le moindre produit à livrer. La somme considérable sera en grande partie utilisée pour former un LLM d'IA propriétaire, ce qui coûte des dizaines de millions d'euros en raison de l'énorme quantité de puissance de calcul nécessaire.
Nabla, quant à elle, construit son produit à partir du modèle GPT-4 d'OpenAI, tout en espérant pouvoir bientôt passer à des LLM open-source à mesure que leur qualité s'améliore. L'utilisation de modèles tiers permet à Nabla de se concentrer sur son produit - plutôt que sur la recherche fondamentale - et des médecins utilisent déjà son compagnon clinicien IA dans des hôpitaux aux États-Unis et en Europe, notamment dans le cadre d'un programme pilote avec le groupe britannique Ramsay.
"En travaillant à OpenAI, on s'est rendu compte que ces modèles sont déjà suffisamment bons pour offrir une valeur économique, mais qu'ils sont très peu déployés dans le monde", explique-t-il.
La conclusion qui en découle, c’est qu’il s'agit probablement autant d'un problème de recherche que d'un problème de produit. L'idée était donc d'essayer de se concentrer sur le problème du produit.
L'approche de Dust et Nabla, qui privilégie le produit pour construire une entreprise d'IA générative, est susceptible de produire des résultats plus rapides, avec des LLM de tiers prêts à être déployés dès aujourd'hui, mais Mistral pense que le plus grand prix ira à ceux qui possèdent la technologie sous-jacente.
En conclusion, il est remarquable - et un peu ironique - que ces nouveaux prodiges de l'IA européenne soient soutenus par des fonds de capital-risque américains, tout en profitant très certainement des crédits impôts recherche et autres mesures fiscalement avantageuses mis en place par le gouvernement français.
Cela dit, la création d'un plus grand nombre de jeunes entreprises d'IA sur le continent ne peut être que positive si l'Europe veut éviter une hégémonie de la Silicon Valley sur la dernière vague de perturbations numériques.
Le Silicon IXème, nouvel épicentre de la French Tech
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