Le reporting extra financier : une analyse de son efficacité

Suite à la conférence TOTEM organisée par BPI France le 23 septembre 2021, nous proposons un résumé de l’excellente analyse de Béatrice BOYER publiée dans son article en 2013 pour mieux cerner le sujet.

Olivier Equey

Manager en fiscalité de la recherche – France

30/09/2021

13 minutes de lecture


Introduction

Le défi de toute économie de marché est d’assurer l’allocation optimale des ressources des épargnants compte tenu des opportunités d’investissement offertes par les entreprises. Dans ce contexte, l’objectif des investisseurs est d’obtenir un taux de rentabilité maximal pour un niveau de risque donné. Ils évaluent les résultats attendus et les risques encourus notamment grâce à l’information que les entreprises publient.

Les entreprises publient, de manière contrainte ou volontaire, diverses informations financières et extra financières. La publication d’informations extra financières s’est fortement développée ces dernières années, suite à la prise de conscience par les entreprises de leur responsabilité sociétale. La croissance du reporting extra financier s’est accompagnée d’une croissance de la réglementation de ce reporting.

Gray et Bebbington (2001) définissent trois catégories de reporting : le reporting dans les documents financiers sur les activités économiques (reporting financier), le reporting dans d’autres parties des rapports annuels ou dans des rapports indépendants sur les autres aspects de l’activité de l’entreprise, environnemental et social (reporting extra financier), le reporting réalisé par des organismes externes à l’entreprise

Le reporting financier

Selon Gray et al. (1995), le reporting financier s’intéresse à la description financière des évènements économiques spécifiques concernant une organisation ou une entité comptable définie afin de fournir des informations à des utilisateurs divers. Les informations financières peuvent être divulguées par les entreprises de manière obligatoire ou volontaire. Les divulgations financières obligatoires sont contraintes par la réglementation comptable.

Le reporting extra financier

Au sein des divulgations d’entreprise, les divulgations extra financières occupent une place importante, liée à la prise de conscience des entreprises de l’élargissement de leur responsabilité : d’une responsabilité économique et financière, l’entreprise est passée à une responsabilité sociétale.

Selon le ministère du travail, « la responsabilité sociétale des entreprises (RSE) est un concept qui désigne l’intégration volontaire des préoccupations sociales et écologiques des entreprises à leurs activités économiques et à leurs relations avec les parties prenantes que sont les salariés, les actionnaires, les fournisseurs, les sous-traitants, les consommateurs… »5 . Les entreprises prennent en compte les impacts sociaux et environnementaux de leur activité et adoptent les meilleures pratiques possibles afin de contribuer à l’amélioration de la société et à la protection de l’environnement. Les entreprises publient volontairement ou de manière contrainte des indicateurs « sociétaux » ou de « durabilité » qui rendent compte de ces pratiques. Selon les entreprises, ces données portent sur leur politique sociale interne, externe et/ou leur politique environnementale (Depoers et al., 2003). Dans la littérature, la publication de ces données est désignée sous les notions de reporting sociétal (Ben Rhouma et Cormier, 2007), de reporting « développement durable » ou de reporting social et environnemental (Capron et Quairel, 2010), de reporting ESG (Environmental, Social and Governance) (KPMG/UNEP, 2010), de reporting CSR (Corporate Social Responsibility) (Dhaliwal et al., 2012).

Une information complète

Leftwich (1980) et Watts et Zimmerman (1986) justifient la réglementation des divulgations par le fait que les informations comptables peuvent être vues comme un bien public. Selon ces auteurs, sans réglementation, il y a un risque de sous-production de l’information

Une information de qualité

En se basant sur les travaux de l’IASB (International Accounting Standards Board) datant de 1989, Botosan (2004) définit la qualité en terme d’utilité de l’information dans la prise de décision économique. L’auteur retient quatre caractéristiques pour une information de qualité : la pertinence, la fiabilité, la comparabilité et la compréhensibilité.

Ainsi, en harmonisant la présentation et le contenu des états financiers des entreprises, et en contraignant les entreprises à adopter ce cadre, la réglementation comptable conduit à la production d’une information financière complète et de qualité, principalement destinée aux investisseurs.

« Dans une approche […] qui identifie les investisseurs comme étant les destinataires privilégiés des états financiers », le reporting extra financier est une réponse de l’entreprise aux attentes des investisseurs qui ont pris conscience des risques sociétaux et de leur impact potentiel sur la valeur de l’entreprise (Giordano-Spring et Rivière-Giordano, 2008). Le reporting extra financier est alors envisagé comme un complément d'information communiqué aux actionnaires et nécessaire à la réalisation de leurs arbitrages financiers (Giordano-Spring et Rivière-Giordano, 2007).

Analyse de la pertinence du reporting extra financier

Clarkson et al. (2008) montrent que certaines entreprises sont capables de produire une information extra financière suffisamment complète et de qualité pour être prise en compte par les investisseurs. Ils analysent la relation entre la performance environnementale et la divulgation environnementale volontaire.

Les résultats obtenus montrent une relation positive entre la performance environnementale et le niveau des divulgations environnementales volontaires : les entreprises qui divulguent beaucoup d’informations environnementales sont celles qui ont une bonne performance environnementale. Les entreprises de type « performance environnementale supérieure » véhiculent leur « type » en utilisant des indicateurs de performance environnementaux objectifs difficiles à imiter par des entreprises de type « performance environnementale inférieure ». Ces dernières choisissent alors de divulguer moins ou de ne rien divulguer concernant leur performance environnementale, évitant ainsi d’être placées dans un groupe d’entreprises pour lequel les investisseurs et autres utilisateurs ont identifié le « type moyen ».

Une forte croissance du reporting extra financier

Le reporting extra financier est la conséquence du succès du développement durable auprès des parties prenantes. Il a incité l’entreprise à publier diverses informations sur les actions conduites en la matière. Le reporting extra financier constitue ainsi pour l’entreprise « la clé d'entrée dans le développement durable car cette démarche l'oblige à réfléchir, de façon concrète, quantifiée et opérationnelle sur ce que signifie pour elle cette notion » (Saghroun et Eglem, 2004). L’étude de KPMG de 2008 montre que les entreprises intègrent de plus en plus leurs informations extra financières dans leur rapport annuel.

Une information extra financière inégalement prise en compte par les investisseurs

Malgré la croissance du reporting extra financier, l’information extra financière reste inégalement prise en compte par les investisseurs. En 2004, une étude de l’UNEP (United Nations Environment Program) constate que les analystes et les institutions financières ne prennent pas suffisamment en compte les informations sociétales (gouvernance, environnement, social) dans leur analyse financière et dans leurs décisions d’investissement alors qu’ils reconnaissent que ces informations affectent, à long terme, la valeur des actifs des actionnaires.

Divers articles récents confirment la faible préoccupation des investisseurs pour les informations environnementales.

Le fait que les investisseurs s’intéressent peu aux informations extra financières, et notamment aux informations environnementales, peut paraître surprenant compte tenu d’une part, de l’impact potentiel des activités sociales, environnementales et éthiques de l’entreprise en matière de création de valeur, et d’autre part, de la conscience de cet impact par les investisseurs.

Si les investisseurs considèrent peu l’information extra financière, c’est parce que le reporting extra financier échoue à leur fournir une information complète et de qualité. Cet échec est lié à la réglementation de ce reporting qui n’impose pas un cadre suffisamment contraignant aux entreprises.

Une règlementation pas assez contraignante

Un rapide état des lieux des réglementations du reporting extra financier permet de constater que les réglementations obligatoires restent nationales et que leur contenu et l’étendue de leurs exigences sont variables selon les pays.

De fait, le faible intérêt des investisseurs tient au caractère insuffisamment contraignant des réglementations, qui n’obligent pas les entreprises à publier, à l’instar des informations financières, des informations extra financières complètes et de qualité.

Les réglementations exigent la publication d’informations extra financières de la part des entreprises, mais elles ne prévoient pas de sanction en cas de non publication ou de publication incomplète. Les pays suivent donc une logique d’incitation.

En outre, si la vérification des informations publiées est imposée par la réglementation, aucune sanction n’est prévue en cas de non respect de cette obligation.

L’obligation de divulgation est peu contraignante, notamment parce qu’il n’existe pas de normalisation obligatoire au niveau international et que les réglementations nationales existantes, même lorsqu’elles contraignent la nature de l’information à produire et les modalités de sa production, ne prévoient généralement pas de sanction en cas de non respect des obligations imposées.

La nécessité d’une normalisation

La normalisation des informations extra financières est une nécessité en raison des faiblesses du reporting extra financier qui sont :

  • le manque de précision et d’exigence dans le contenu des informations requises
  • le manque de comparabilité des informations lié au manque d’harmonisation de la quantité et de la présentation des informations requises
  • des informations perçues comme complexes par beaucoup d’investisseurs car difficiles à articuler, à évaluer et à intégrer dans des décisions d’investissement

Les analystes expriment, à une quasi-unanimité, une attente forte en matière de détermination d’un cadre normatif cohérent. Ils souhaitent disposer d’informations objectives, organisées et standardisées, afin de pouvoir procéder à des comparaisons.

Les réglementations nationales étant variables dans le contenu, une normalisation internationale semble indispensable, afin d’accroître la comparabilité des informations entre entreprises de nationalité différente.

La nécessité de sanctions

La France est souvent citée comme référence en matière de réglementation contraignante du reporting extra financier. Pour autant, l’analyse de DamakAyadi (2010) sur les pratiques de reporting social et environnemental en France de 2002 à 2005 montre que malgré la croissance des informations publiées, « les résultats concernant la conformité à cette nouvelle réglementation restent mitigés ».

L’absence de sanction n’incite pas les directions d’entreprise à se conformer à la loi. Pourquoi les directions d’entreprise se plieraient-elles à une obligation non sanctionnée qu’elles perçoivent comme une contrainte supplémentaire et un exercice accessoire ?

En l’absence d’une obligation de divulgation contraignante - normalisation internationale obligatoire et sanction en cas de non respect de l’obligation de divulgation - le reporting extra financier ne permet pas de fournir aux investisseurs une information complète et de qualité.

La nécessité d’un audit externe

Pour Quairel (2004), les enjeux de la vérification sont fondamentaux pour la crédibilité des reportings sociétaux. Comme pour les informations financières, l'audit des informations publiées est un déterminant de la qualité de l’information.

Il n'y a aucune raison pour que le public ait confiance dans les informations publiées si elles ne sont pas validées par des auditeurs indépendants et compétents. La certification des rapports développement durable par un organisme spécialisé, indépendant, distinct des commissaires aux comptes est également un souhait des analystes financiers.

L’analyse de la réglementation du reporting extra financier (Boyer, 2013) montre que, compte tenu de ses insuffisances, la réglementation actuelle ne permet pas de produire une information complète et de qualité. Cela expliquerait pourquoi les investisseurs, conscients de ces insuffisances, ne prennent que peu en compte l’information extra financière dans leurs décisions d’investissement.

Conclusion

Malgré une évolution importante de sa réglementation, le reporting extra financier relève d’une démarche essentiellement volontaire de la part des entreprises. Certes, ce reporting a connu récemment une forte évolution, mais il semble qu’en publiant des informations extra financières, les entreprises répondent plus à une logique de légitimité - qui vise à communiquer auprès de leurs parties prenantes afin de légitimer leur position au sein de leur environnement - qu’à une logique financière - qui vise à permettre aux investisseurs d’évaluer les risques et la performance attendue de leurs activités

Dans la mesure où les marchés financiers sont des acteurs clés dans la performance écologique et durable des entreprises (UNEP, 2004), si l’on souhaite que leur comportement évolue vers une performance durable croissante, il faut faire en sorte que les entreprises publient une information extra financière complète et de qualité qui sera prise en compte par les investisseurs. En effet, si elles y trouvent un intérêt financier, notamment à travers la baisse de leur coût de financement, les entreprises feront des efforts dans le domaine de la performance durable. Selon Gray (2006), les rapports actuels ne peuvent pour l’instant pas contribuer à l'amélioration du comportement des entreprises.

Financer des projets innovants répondant à des enjeux sociétaux

Le pilier II du programme Horizon Europe « Défis mondiaux et compétitivité industrielle européenne » finance des projets qui répondent aux priorités stratégiques de l'UE, telles que l'Accord de Paris sur le changement climatique, le Programme des Nations Unies pour le développement durable à l'horizon 2030 et les Objectifs de développement durable.

Le Pilier II permet de mettre en œuvre principalement par une recherche collaborative et des projets innovants qui répondent à des défis prédéfinis et rassemblent des acteurs privés et publics, des utilisateurs finaux, des scientifiques, des technologues, des producteurs, des innovateurs, des entreprises, des éducateurs, des décideurs, des citoyens et des organisations de la société civile.

L'accent est mis sur la société et l'utilisation de la recherche scientifique pour le bien commun, et non plus dans un but exclusivement commercial.

Source :

BOYER, Béatrice. Faut-il mieux réglementer le reporting extra financier pour améliorer sa prise en compte par les investisseurs?. In : Comptabilité sans Frontières... The French Connection. 2013. p. cd-rom.

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